Mon garçon est différent, et après
Mon garçon est différent, et après
Lorsque Stéphany m’a demandé d’écrire un article concernant le handicap invisible, j’ai tout de suite répondu oui. Pourquoi ? J’ai été interpellée par ce sujet, car cela nous touche personnellement et aussi à travers notre travail.
Qu’est-ce que le handicap invisible?
Le handicap invisible est un handicap non détectable, qui ne peut pas être remarqué si la personne concernée n’en parle pas. Le trouble dont elle souffre impacte pourtant sa qualité de vie.
La différence
Mon garçon de 7 ans, Samuel, est anxieux, hypersensible et à haut potentiel. Un enfant ayant un haut potentiel, c’est beaucoup plus que seulement être brillant au niveau scolaire. Cela apporte un lot de difficulté très grand, mais il réussit à bien vivre avec cela, car nous avons eu la chance qu’il puisse grandir près de nous. Il n’est pas allé à la garderie ni la maternelle, car nous travaillions de la maison, donc il a pu apprivoiser ce handicap invisible à son rythme.
J’appréhendais sa première année scolaire. Cette première année fut très difficile pour lui et pour nous aussi au niveau émotionnel. L’entrée scolaire fut toute une adaptation pour lui, car cela représente beaucoup de monde, de bruit et de devoir se séparer de nous et de son environnement sécurisant et ce, plusieurs heures par jour.
Le commentaire des gens était : « C’est certain qui réagit ainsi puisqu’il n’a jamais été sans vous. » À l’intérieur de moi, je me disais: « Si vous saviez. » En apparence, Samuel est un super beau garçon très sociable oui oui, très brillant et qui veut tout connaître du monde. Il est très allumé et très emphatique.
Plus il grandit, plus il accumule des expériences positives qu’il met dans la boîte à outils de son cerveau et plus c’est facile pour lui. Toutefois, toutes ses premières fois engendrent dans son cerveau l’alerte « CAUSE INCONNUE », ce qui l’amène à vivre une très grande anxiété ainsi que beaucoup de peur face à cet inconnu.
Depuis son très jeune âge, j’ai énormément lu pour chercher à comprendre tout ce que ce petit être vivait. Nous avons appris à le connaître dans son unicité qui est hors norme de la société, ce qui fait de lui un être extraordinaire.
Qui décide qu’est-ce que la différence ? Et si c’était magnifique d’être différent, car ça l’est!
Le jugement des gens
Dans cette situation, ce qui me dérange le plus, ce n’est pas son handicap invisible, mais plutôt les commentaires des gens qui ne savent pas. Ce sont eux qui généralisent à tous les enfants avec des faits tels que 1 plus 1 égale 2. Mais il y a plus de nuances que ça.
Je n’ai pas toujours envie de tout expliquer, j’aimerais plutôt que les gens comprennent sa différence comme quelque chose d’unique, de beau et non d’ANORMAL.
Oser
Chaque choix que nous avons fait a été pour le bien de notre garçon. Nous faisons les choses différemment et nous en sommes heureux. J’ai rarement eu droit à des crises de mon garçon contrairement à ce qu’on peut entendre de parents qui ont un enfant normal. Pourquoi ? Je crois que l’écoute et le temps font une réelle différence. Nous avons pris le temps d’expliquer à de multiples reprises et cela a donné des résultats magnifiques. C’est une forme d’aventure et de parcours à la découverte de l’essence de notre ti homme extraordinaire.
Les gens pensent souvent à la SOCIABILISATION, parce qu’il ne voit pas grand monde. Mais non, ce n’est pas pour cela qu’il est différent. Il est Samuel. Samuel a un programme différent qui fait de lui une personne différente et il est bien comme ça (il n’est pas tombé bien loin de l’arbre hihi).
Pour se protéger et ainsi vivre moins de stress et d’anxiété, nous allons une étape à la fois. Ce n’est pas parce que notre garçon n’est pas allé à l’école qu’il n’est pas sociable. Ce n’est pas non plus parce qu’il a de la difficulté avec le détachement qu’il n’est pas sociable. Je crois qu’au contraire, le fait d’avoir eu la chance d’y aller une étape à la fois et ce, sans le bousculer, lui permet aujourd’hui d’apprivoiser sa magnifique différence au lieu de la repousser. Il se remémore ces moments comme un tremplin à chaque fois, car il sait qu’il est capable. Le fait d’avoir respecté son rythme et d’avoir accueilli sa diversité nous a aussi amené à emprunter un chemin différent et de pousser plus loin ma compréhension de l’être humain et j’en suis bien heureuse.
Je suis consciente que nous avons eu une grande chance d’y aller étape par étape. J’en suis ravie, car Samuel a appris à vivre avec lui-même. Plus il vieillit, plus son cerveau se développe par l’entremise de ses propres expériences et il est capable de relativiser au lieu d’avoir été bousculé et que ses mécanismes de défense augmentent.
Dans notre société, nous sommes portés à vouloir régler un problème et le faire disparaître. Et si on laissait le temps à nos enfants d’apprendre à vivre avec leur différence dans un monde en constante évolution? Tous ces gens qui ont des handicaps invisibles, si nous les accompagnions dans l’apprentissage de vivre avec leur handicap, de les soutenir et de voir le beau de cette différence?
Un exemple
Voici une situation vécue par Samuel quand il avait environ 3 ans. Il y en aurait eu plusieurs, comme le bruit qui l’agressait, le vent qui lui faisait peur, sa sensibilité extrême à l’odeur… En voici un.
Moi et Samuel, on se promenait dans notre rue et une jeune fille d’environ 2 ans est tombée à côté de nous. Elle s’est mise à pleurer très fort après s’être blessée. Samuel étant très empathique a alors ressenti la douleur de cette jeune fille. Cet événement a fait en sorte que chaque fois qu’il voyait un enfant plus jeune que lui, il se bouchait les oreilles et ne bougeait plus. Il cherchait à aller dans nos bras pour se protéger, pour ne pas avoir à revivre cette souffrance.
Est-ce que nous avons dit d’arrêter de réagir ainsi ? Non. Nous lui avons expliqué que sa capacité à ressentir était une grande qualité. Malgré cette belle sensibilité, il n’a pas à prendre cette souffrance sur ses épaules à lui, ça ne lui appartient pas. Chaque fois que nous voyions un enfant plus jeune que lui, je voyais son corps se crisper. Je prenais le temps de lui expliquer la situation qu’il a vécue et la situation de maintenant encore et encore. Aujourd’hui, il n’aime pas entendre des bébés pleurer, mais son corps ne réagit plus. Chaque situation depuis sa jeunesse a été comme cela. Nous avons tous travaillé fort ensemble. À mon avis, l’enfance est déterminante pour devenir un adulte épanoui. Nous ne sommes pas parfaits, nous apprenons encore et ce sera toujours ainsi. Le meilleur des remèdes pour nous est la combinaison de l’amour, l’écoute, la patience et la compréhension.
La vie fait si bien les choses!
Dans notre vie, nous avons enseigné les signes à Samuel. Cela a été très libérateur pour lui de s’exprimer très tôt avec son corps quand l’émotion était trop grande. C’est incroyable ce que ça lui a apporté. Nous le remarquons aussi régulièrement dans le cadre de notre travail, l’aspect libérateur que cela apporte aux enfants.
En conclusion
On juge trop, tout, dans notre société. On veut tellement tout catégoriser. Nous avons du travail à faire en tant que société, mais c’est possible. Je suis fière d’avoir réussi à montrer à notre garçon qu’il est différent et que c’est magnifique. Chaque différence est unique et nous offre plusieurs chemins qui peuvent être utilisés pour nous amener vers l’acceptation de cette belle diversité.
On nous surnomme les extraterrestres, mais nous en sommes bien HEUREUX!
Quel genre de compréhension aimeriez-vous avoir de la part de votre entourage que vous n’avez pas face à votre handicap invisible?
Amusez-vous avec vos différences.
Eugénie Miron
Application Samuel Signes à la plage disponible en 4 versions:
LSQ, Langue des signes québécoise
LSF, Langue des signes française
ASL, American sign language
Version originale simplifiée Samuel Signes